Février 1974
FEVRIER 1974
A partir des années 60, une grave crise secoue la filière canne. Les usines ferment. De 12 sucreries en 1962, on passe à 2 en 1974. Des 62 rhumeries en 1962, il n'en reste plus que 20 en 1974. Le chômage augmente considérablement. De 1967 à 1974, on dénombre 5000 chômeurs de plus. La banane remplace peu à peu la canne. Le secteur du bâtiment est touché de plein fouet aussi. De plus en plus les jeunes émigrent vers la France.
La Martinique subit les conséquences du « choc pétrolier » de 1973. Les pays producteurs de pétrole augmentent le prix du baril. Par ricochet et parce que les capitalistes veulent conserver leurs marges bénéficiaires, les prix flambent. L'inflation atteint les 20%. Le prix de l'huile est doublé, le prix du riz est triplé. Le bœuf, la morue, les transports… tout augmente.
Les travailleurs vivent une situation marquée par la précarité, pas de règles (durée plus de 12h, toujours plus de travail), utilisation de produits toxiques, pas de sécurité ni d'hygiène, salaires de misère pas de SMIC mais un SMAG à 29F55.
Tout cela a pour effet de provoquer un mécontentement dans la population, et chez les travailleurs. Entre fin 73 et début 74, les grèves et les manifestations vont se succéder : camionneurs, bâtiment, lycées, banques, dockers, SPDEM (Electricité)…
C'est dans ce contexte de misère, de mécontentement et de luttes, que va démarrer la grève des ouvriers agricoles, le 17 janvier 1974 sur l'habitation Vivé au Lorrain puis sur celles d'Assier et de Fond Brûlé. Un comité de grève regroupant les 3 habitations est créé ; plus tard, c'est la création du comité de grève des travailleurs Agricoles de la Martinique. Une plate-forme revendicative est élaborée en 11 points. La grève est marchante. Les travailleurs passent d'habitation en habitation pour informer et mobiliser leurs frères de misère.
Malgré la campagne de désinformation (France-Antilles, Préfet Orsetti, SICABAM…), la mobilisation est importante. Environ 5000 personnes défilent à Fort-de-France. L'UPSOA (Union Patriotique de Soutien avec les Ouvriers Agricoles) est crée.
Le 13 février, les patrons proposent 32f au lieu des 35F46 réclamés. Les travailleurs repartent pour expliquer, habitation par habitation, pourquoi il faut continuer à se battre. C'est alors que sur la route de Basse-Pointe, à l'habitation Chalvet que se produit le drame. Les ouvriers sont attaqués par 200 gendarmes en armes, appuyés par un hélicoptère. Ils encerclent les grévistes et leur tirent dessus. Manifestement, ils voulaient abattre des nègres. RENOR ILMANY, 55 ans est tué. Plusieurs de ses camarades sont grièvement blessés : GUY CRETINOIR, ROBERT CYRILLE, FRANÇOIS ROZAS ET HENRI RASTOCLE.
Le 16, pendant l'enterrement d'Ilmany on apprend la mort du jeune MARIE-LOUISE, retrouvé sur une plage non loin de la fusillade, dont le corps portait des traces de torture. Le 19, signature d'un accord entre les patrons et la CGT : 35F50 pour 8h (mais le SMAG continue d'exister), paiement des heures supplémentaires, pas de licenciement. Malgré l'accord, la répression va continuer : licenciement, procès, interpellations, refus d'embaucher... Mais les assassins ne sont pas inquiétés.
Février 74, Lonè ek respé ba yo